L’Alliance Nationale pour le Changement (ANC), le Pacte Socialiste pour le Renouveau (PSR), l’Alliance des Démocrates pour le Développement Intégral (ADDI), et Sursaut–Togo, constitués en Front Républicain pour l’Alternance et le Changement (FRAC) et le Parti des Travailleurs, fermement soutenus par les populations togolaises qui se sont massivement mobilisées pour prendre part à la marche pacifique de ce jour mercredi 23 novembre 2011,
saisissent l’occasion de la 22ème session de l’Assemblée Parlementaire Paritaire ACP/ UE pour adresser à tous les Membres et Participants, le présent mémorandum sur l’affaire qui oppose neuf députés ANC à l’Etat du Togo.
L’ANC, faut-il le rappeler, est créée par une grande majorité de cadres et d’élus qui ont démissionné de l’Union des Forces de Changement (UFC), à cause de la décision unilatérale de son Président, M. Gilchrist Olympio, de signer un accord avec le parti au pouvoir, le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT).
Aujourd’hui, l’UFC fait cause commune avec le pouvoir en place qui n’a de cesse de fouler au pied la Constitution et les lois de la République, de violer au quotidien les droits et libertés des citoyens et de perpétuer l’impunité et la mal gouvernance au Togo.
C’est ainsi que par décision en date du 22 novembre 2010, la Cour constitutionnelle du Togo, sur la base de lettres de démission en blanc, non datées, transmises par le Président de l’Assemblée nationale, a révoqué neuf (09) députés ANC de leur mandat parlementaire, en violation de l’article 52 de la Constitution du Togo qui interdit le mandat impératif.
L’ANC a porté cette affaire devant plusieurs organisations internationales, notamment l’Union Interparlementaire (UIP) et l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF), et déposé une plainte à la Cour de Justice de la CEDEAO.
Par une décision adoptée au cours de sa session d’avril 2011 et confirmée au cours de ses sessions de juillet et d’octobre 2011, l’UIP reconnaît sans ambigüité ‘’qu’il ne s’agit pas, en l’espèce d’une démission volontaire, mais de la révocation d’un mandat parlementaire.’’ L’UIP établit qu’en révoquant ainsi les neuf députés ANC de leur mandat parlementaire, la Cour Constitutionnelle viole les dispositions de la Constitution du Togo interdisant le mandat impératif ainsi que celles pertinentes de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des Instruments Internationaux des Droits de l’Homme, qui font partie intégrante de la Constitution de la République togolaise. L’UIP demande aux autorités togolaises de réparer ces violations en rétablissant dans leurs droits, les neufs députés ANC.
Les décisions de l’UIP ont été tout simplement balayées du revers de la main par les autorités togolaises au motif que l’UIP n’est pas une cour d’appel de la Cour Constitutionnelle et que ses décisions, auxquelles les députés doivent une obéissance absolue, ne sont susceptibles d’aucun recours.
Le 07 octobre 2011, la Cour de Justice de la CEDEAO, siégeant à Porto-Novo en République du Bénin, rend son arrêt N° ECW/CCJ/JUD/09/11 dans lequel elle établit clairement que les neuf députés n’ont jamais démissionné de leur mandat parlementaire et ‘’dit qu’il y a violation par l’Etat du Togo, du droit fondamental des requérants à être entendus tel que prévu aux articles 10 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et 07 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.’’ La Cour condamne en conséquence l’Etat du Togo et lui ‘’ordonne de réparer la violation des droits de l’Homme des requérants et de payer à chacun trois millions de FCFA’’. La Cour condamne également l’Etat du Togo aux dépens.
En réponse, le Conseil des ministres a rendu public, le mercredi 02 novembre 2011, un communiqué selon lequel le gouvernement togolais décide de limiter l’exécution de l’arrêt de la Cour à une ‘’réparation pécuniaire’’ par le paiement, de trois millions de FCFA à chacun des neuf députés ANC. En outre, par une correspondance en date du 11 novembre 2011, le gouvernement fait savoir que pour lui, « réparer et payer » signifie « payer en réparation ».
Ainsi, non content de violer la Constitution, les lois de la République et les droits des citoyens, le gouvernement togolais défie l’ensemble de la communauté internationale, en violant délibérément les textes et instruments juridiques internationaux de protection des droits de l’homme auxquels le Togo est partie et en refusant de se conformer aux décisions des instances et juridictions supranationales.
Face au traitement inacceptable infligé à des élus du Peuple, face à la décision outrageante du gouvernement togolais, qui réduit le mandat parlementaire à un vulgaire objet vénal, il y a lieu de s’interroger sur l’opportunité de financer à grands frais, grâce à l’aide internationale et notamment celle de l’Union Européenne, des élections législatives censées favoriser le débat parlementaire, si tous ces efforts doivent être ruinés par des pratiques qui bafouent le suffrage du peuple et le mandat parlementaire.
Les populations togolaises s’étonnent qu’une institution aussi prestigieuse que l’Assemblée Parlementaire Paritaire ACP/UE, n’ait apporté aucun soutien à des députés togolais ainsi révoqués de leur mandat parlementaire, dans un environnement constitutionnel qui interdit le mandat impératif.
Les populations togolaises s’interrogent sur la valeur et sur le sens de leurs suffrages lorsqu’elles sont obligées de descendre dans la rue pour réclamer justice et faire respecter le mandat de leurs élus.
Les populations togolaises s’indignent des propos scandaleux de Monsieur Louis Michel, co-président de l’Assemblée ACP-UE qui, dans cette affaire, ne se gêne pas pour cautionner les forfaitures de l’Assemblée nationale et de la Cour Constitutionnelle togolaise, en faisant fi de la Constitution et des lois de notre pays.
En soutien aux neuf députés ANC, le FRAC et les populations togolaises appellent l’Assemblée Parlementaire Paritaire ACP/UE à user de son influence pour amener les autorités togolaises à redonner un sens à la Représentation nationale et au débat parlementaire au Togo en prenant, notamment à sa session de Lomé, une résolution qui invite les autorités togolaises à organiser diligemment la reprise par les députés ANC, de l’exercice de leur mandat parlementaire.
Le FRAC et le Parti des Travailleurs remercient l’Assemblée Parlementaire Paritaire ACP/UE, ses membres ainsi que tous les participants à la 22ème session de Lomé, de toutes les initiatives et actions qu’ils entreprennent pour faire prévaloir la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance dans le monde et singulièrement au Togo.
Fait à Lomé, le 23 novembre 2011
Pour le FRAC et le Parti des Travailleurs,
Le Président National de l’ANC
Jean-Pierre Fabre