Radio Kanal K – “Fenêtre sur l’Afrique” est une émission hebdomadaire de Radio Kanal K à Aarau en Suisse
Journalistes : Sylvain Amos un confrère basé en Allemagne : Romain Koudjodji
Email : fenetre.afrique@gmail.com
Samedi 18 septembre 2010, 20-21h.
Partenaires: Togocity.com et icilome.com
Fenêtre sur l’Afrique du 18 Septembre 2010 sur Radio Kanal en Suisse a été consacrée à l’actualité politique au Togo, la manifestation internationale contre le système Françafrique dont Farida Nabourema est l’une des oganisateurs. Dr Yves Ekoué Amaïzo est intervenu au nom du CVU, Collectif pour la Vérité des Urnes et a soulevé les mauvaises tractations du président Blaise Campaoré dans la facilitation de la crise politique togolaise.
Laurent Despas Directeur de Koaci.com est également intervenu dans cette émission sur la problématique de la non transparence des élections en Afrique surtout au Togo, en Guinée, Côte-D’Ivoire, Gabon etc…
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Interview : Dr Yves Ekoué Amaïzo,
Coordonnateur provisoire international du Collectif pour la Vérité des Urnes
Email: info@cvu-togo-diaspora.org
Site Internet: www.cvu-togo-diaspora.org, www.cvu-togo.org
1. Kanal K : Le CVU dont vous êtes le coordinateur international provisoire vient de sortir une déclaration qui met en cause la neutralité de Blaise Compaoré président du Burkina Faso principal facilitateur de la crise politique du Togo. Est-ce à dire que la facilitation du président Blaise a échoué ?
YEA : Oui, il n’y a eu ni précisions, ni clarifications sur les résultats des élections présidentielles du 4 mars 2010 au Togo. Il n’y a pas eu de séparation des pouvoirs entre la commission électorale nationale indépendante (CENI), l’Administration centrale et la Cour Constitutionnelle. Il n’y a pas eu de vérifications entre les souches et les bulletins de vote. En conséquence, nul ne sait qui est le Président au Togo sauf ceux qui l’affirment. La facilitation a surtout introduit une discrimination négative en éliminant, de manière arbitraire, la participation de certains partis politiques représentatifs ainsi que la Diaspora togolaise… Du coup, le Président-facilitateur a sa part de responsabilité dans le renouvellement de la situation postélectorale de 2005 dans une version améliorée de 2010. Le CVU se demande où est l’intégrité et ne peut imaginer que cela recommence pour les élections à venir, et plus particulièrement les présidentielles de 2015 si le calendrier est respecté.
2. Kanal K : Le CVU est-il allé voir une seule fois le facilitateur Blaise Compaoré pour connaitre l’état de l’avancement des négociations avant son jugement ? Car ce n’est pas tout ce qui se négocie qui se met sous projecteur ?
YEA : Non, le CVU n’a jamais été invité et plus particulièrement la partie Diaspora togolaise n’a jamais été représentée. D’ailleurs, je vous rappelle qu’un Mouvement citoyen libre et indépendant n’a pas à solliciter un système qui fonctionne sur la base de la non-transparence et la règle du silence qui fait office de l’“obligation de réserve”. Ainsi, ce qui n’est pas mis sous le “projecteur” comme vous dites, peut se révéler n’être qu’un piège comme certains partis l’ont expérimenté. Ce manque de transparence dans la facilitation a certainement facilité la dilution des responsabilités ainsi que les modifications des accords obtenus et modifiés unilatéralement contre l’avis des principaux partis d’opposition. Cette gouvernance non-transparente de la facilitation a facilité le renouvellement d’élections irrégulières au Togo, tant en 2005 qu’en 2010. Donc pour éviter les “messes basses” qui pourraient conduire le Togo à ne jamais connaître la vérité des urnes, entre aujourd’hui et 2015, il faut arrêter les dégâts.
Il y a lieu de proposer, sans arrière-pensées, d’autres alternatives crédibles qui peuvent fonder un consensus international. Je rappelle que d’après les sondages internes au CVU, qui rejoignent l’opinion de la population togolaise libre de ses mouvements et sa pensée, personne ne souhaite voir le facilitateur-Président Blaise Compaoré recommencer la gestion unilatérale qu’il a donnée et imprégnée au dossier togolais. Le CVU ne souhaite plus que des discussions se fassent en dehors des “projecteurs”, surtout que certains projecteurs ne voient pas les transferts substantiels d’argent et les intimidations discrètes mais non moins réelles, qui d’ailleurs ont amené certains personnalités à travailler avec le RPT.
3. Kanal K : Pourquoi Ouaga n’inspire plus confiance au CVU ?
YEA : Ce n’est pas la jolie ville de Ouagadougou qui n’inspire pas confiance au CVU, encore moins les citoyens et citoyennes très accueillants du Burkina-Faso, tous connus comme un peuple intègre. Par contre, c’est un mode de gouvernance de la facilitation cachée sur la médiation qui est inadmissible car cela donne des résultats contraire à la volonté des urnes et donc à la volonté du Peuple togolais. Le CVU ne fait que rappeler des vérités et souhaite que certaines évidences trompeuses en provenant de Ouagadougou ne continuent pas à retarder la refondation démocratique au Togo. De plus, je vous rappelle que le CVU, un mouvement citoyen, n’a pas vocation à aller prendre un quelconque pouvoir.
Le CVU ne cherche que le retour d’une démocratie non tronquée, fondée sur la vérité des urnes. Cela devrait aider à améliorer le mieux-être des Togolais et Togolaises dans un esprit de transparence et de vérité. Si Ouaga a perdu son capital-confiance, c’est que les méthodes utilisées et la gouvernance spéciale de la facilitation ne marchent pas pour le Togo.
4. Kanal K : Le CVU recommande aux politiques togolais et également à la communauté internationale la médiation d’Amadou Toumani Touré, Président du Mali. Pensez-vous que le Mali est mieux placé pour conduire les différents protagonistes togolais vers une sortie de crise là ou le Président Blaise Compaoré a échoué ?
YEA : Oui, ce n’est pas tant le Mali qui est mieux placé, ni même la personne du Président Touré. Mais ce sont les gestes passés, posés par le Président ATT, qui constituent des preuves évidentes d’organisation du retour de la confiance. Il est possible de citer :
- la volonté de pacifier son pays ou d’autres en Afrique ;
- la vision et la volonté de soutenir un véritable processus de développement ;
- la création de capacités productives et d’emplois décents ;
- le fait de ne pas changer la Constitution et de quitter librement le pouvoir, et enfin
- la détermination qui est la sienne de respecter la volonté du peuple et la vérité des urnes au Mali.
Il faut donc arrêter de croire qu’il s’agit d’un problème de personnes. Une personnalité politique de la facilitation/médiation et de la paix est jugée sur sa capacité à créer le consensus et la paix entre les principaux partis politiques. Si vous regardez les dossiers dans lesquels ATT a été impliqué et si vous analysez les évènements qui ont suivis ses interventions en tant que médiateur (Centrafrique par exemple), vous constaterez que les résultats ont été substantiellement positifs et surtout n’ont pas traîné en longueur.
Après 10 ans de facilitation/médiation au Togo avec le Président Blaise Compaoré :
- des représentants de la population togolaise sont obligés d’aller faire des veillées de prière tous les mercredi et des marches tous les samedis pour témoigner pacifiquement leur protestation contre la proclamation de la contre-vérité des urnes ;
- des journalistes sont empêchés de faire leur métier quand des agents des forces antirépublicaines ne trouent pas leur main avec un couteau sans que cela n’émeuve grand-monde ; les voies de fait commis par ces agents du pouvoir ne sont que des obstructions à la liberté de la presse ;
- des politiciens de renom sont séquestrés et ne peuvent plus organiser des réunions en toute sécurité alors que des intimidations d’assassinats circulent contre les dirigeants des partis politiques et les populations sympathisantes ;
- des membres importants de la Diaspora sont kidnappés en plein jour et tout ceci dans une impunité totale.
Alors oui, le silence du Président-facilitateur est douteux et relève de la neutralité coupable. Il y a des probabilités positives que ATT soit mieux placé que Blaise Compaoré pour accompagner le Togo vers la refondation démocratique du pays.
Il n’est pas impossible que le travail d’influence et de transparence que mène le CVU puisse réveiller la conscience de l’homme intègre du Burkina Faso. Mais la durée de la facilitation/médiation de Blaise Compaoré en Côte d’Ivoire, celle qui commence à s’éterniser en Guinée et le refus de la junte militaire du Niger de faire appel à la facilitation du Burkina-Faso sont quelques éléments d’analyse que le CVU a voulu porter à la connaissance du Peuple togolais pour mieux l’éclairer dans ses choix. Le Peuple togolais est toujours libre de se faire sa propre opinion.
5. Kanal K : Les manifestations du FRAC sont toujours violemment réprimées à coups de matraques et de gaz lacrymogènes par les forces de l’ordre. En vérité, les manifestations du FRAC ne se tiennent plus. Selon vous. le Front est-il en train de s’étouffer et de s’affaiblir ?
YEA : Non, le FRAC est une constellation qui continue sa route et n’a pas besoin que des manifestations populaires pour exister. Par ailleurs, vous dites que les manifestations des représentants du FRAC, celles du parti OBUTS et je rajouterais de la population togolaise, continuent à se tenir. Mais vous oubliez de préciser, dans votre question, que le mercredi 15 septembre 2010, tous les “leaders” des partis d’opposition déclarés ont été séquestrés à leur domicile par Faure Gnassingbé et son système RPT/AGO. C’est CVU qui a heureusement adressé une “alerte info” aux communautés togolaises, internationales et africaines.
Les nouvelles formes d’emprisonnements et d’assignation à domicile sont une atteinte flagrante à la liberté d’aller et de venir. Le droit de se réunir n’existe plus au Togo alors que la Constitution le prévoit. Tous rassemblements, veillées et marches pacifiques au Togo sont considérés par Faure Gnassingbé et le réseau RPT/AGO comme une menace au régime illégitime en tentant de faire croire à la communauté internationale qu’il s’agit d’insurrection. Le CVU rappelle que sans l’intervention des forces antirépublicaines togolaises, les manifestations de contestation ont prouvé qu’elles ont toujours été pacifiques. Il semble que les forces antirépublicaines du RPT/AGO confondent l’ordre avec la terreur et l’intimidation et ne font qu’obstruction à la liberté de contester la contre-vérité des urnes. La disproportion dans les réponses à apporter relève plus de la panique au sein d’un régime illégitime incapable d’apporter un quelconque bilan positif au plan économique et des droits humains au Togo.
Alors, je vous le rappelle que pour le CVU, il n’y a que deux partis politiques au Togo : ceux qui ont choisi la vérité des urnes et s’organisent pour la défendre, et ceux qui pratiquent la contre-vérité des urnes et cherchent à empêcher toute forme de démocratie et de liberté au Togo. Donc pour le CVU, les partis formant le Front Républicain pour l’Alternance et le Changement (FRAC), comme au demeurant l’Organisation pour Bâtir dans l’Union un Togo Solidaire (OBUTS) font partie de la première catégorie.
6. Kanal K : Pourquoi le CVU ne va pas plus loin en portant plainte contre le régime au niveau de la CEDEAO par exemple ou encore à la cour pénale internationale ?
YEA : Votre question est pertinente mais mérite des éclaircissements. En effet, n’est-ce pas les représentants de la CEDEAO et de l’Union africaine qui sont venus faire du tourisme électoral au Togo et ont conduit à avaliser des résultats foncièrement en décalage avec la vérité des urnes ? N’est-ce pas la CEDEAO qui a reconnu avant la Cour constitutionnelle du Togo que Faure Gnassingbé serait le Président du Togo ? Et vous voudriez maintenant que le CVU aille leur demander de mettre en cause une combine dolosive qui n’était pas du tout inconnue du système RPT ? Quant aux juridictions internationales, vous savez bien qu’elles ne poursuivent que les individus qui gênent les intérêts premiers des pays occidentaux qui ont financé ces institutions. Donc, votre question tend à faire croire que la solution pourrait se trouver à l’extérieur du Togo. La CEDEAO comme au demeurant l’Union africaine, en attendant l’Union européenne, doivent des excuses formelles au Peuple togolais. Encore faut-il que le Peuple togolais les accepte, car si on doit demander aux familles qui comptent leurs morts, leurs blessés, les personnes frappées, séquestrées ou violées, les personnes emprisonnées sans motifs, etc. au Togo, je pense que le pardon peut se révéler très pénible.
7. Kanal K : D’aucuns pensent que le problème de la crise togolaise est la France. Quelle analyse générale faites-vous du système Françafrique, dont l’acte de décès n’est pas encore établi ?
YEA : La Françafrique n’est pas la France. Et la France n’est pas la Françafrique. Mais la France profite de la Françafrique. Et la Françafrique a besoin de la France pour contrôler les richesses africaines et donc togolaises. Pour ce faire, il y a besoin donc de transformer Faure Gnassingbé et son réseau RPT/AGO en simple exécutant qui défend les intérêts de Françafrique au-dessus de ceux des Togolais. Les manettes de contrôle à distance ne fonctionnent pas sur une base automatique compte tenu des velléités de rébellion au sein même du RPT.
L’argent et la circulation nord-sud et aussi sud-nord permettent de faire le lien et font perdurer le système Françafrique. La France officielle ne voit rien, n’a participé à rien et n’a rien à dire. Chacun jugera ! Donc vous avez raison, la Françafrique n’est pas morte. Au passage, la rupture tant promise par un Président de la République française n’est toujours pas au rendez-vous, en tous cas, pas au Togo.
Je vous remercie. YEA.
Fofo says
Félicitation pour le travail du CVU. En moins de 30 min vous avez publié l’interview. On a besoin des homme comme vous pour construire le TOGO.