Dans la branche radicale de l’opposition togolaise toujours incarnée par l’Ufc (Union des forces de changement, principal parti de cette mouvance politique), autant les acteurs sont prêts à déblatérer contre toute forme de traîtrise, autant ils acclament le retour vers le « droit chemin » de ceux qui autrefois s’assimilaient à des hommes-liges du régime en place à Lomé. Agbéyomé Kodjo, le leader de l’Obuts (Organisation pour bâtir dans l’union un Togo solidaire) est dans ce cas-là. Et ce n’est pas pour lui déplaire.
Le Front républicain pour l’alternance et le changement (Frac) est constitué de partis qui profitent de la popularité de l’Ufc. C’est en ces termes que résumait Gilchrist Olympio (avant l’entrée de ses proches dans l’actuel gouvernement) sa méfiance vis-à-vis de ce regroupement. Une somme de divers courants politiques partageant l’idéologie de l’Ufc, et surtout revendiquant « la victoire » de Jean-Pierre Fabre lors de la dernière présidentielle du 4 mars.
Agbéyomé Kodjo a justement été le premier politique à reconnaître « la victoire » du candidat de ce Front lors de cette joute. Depuis son engagement aux côtés du Frac, sa popularité semble aller crescendo. Il faut surtout se déplacer aux meetings qui ponctuent depuis 15 samedis, les marches hebdomadaires du Frac pour s’en convaincre. Quand le patron de l’Obuts ne monte pas sur le podium, la foule le réclame à cor et à cri. Même plus que Jean-Pierre Fabre censé focaliser la majeure attention des militants.
Il faut dire que contrairement à M. Fabre qui est en train de “faire ses classes en matière de grand show politique”, Gabriel Kodjo est un fin manipulateur de l’émotion de la masse populaire. Une donne qui a pris une toute autre dimension depuis l’ouverture d’un procès contre son parti sur la base d’une « interprétation d’une autre époque » de la Charte des partis politiques.
« Obuts, Obuts, Obuts », clament chaque samedi les partisans du Frac quand l’ancien directeur général du Pal (Port autonome de Lomé) tarde à prendre la parole. En habile tribun et amateur de bains de foule, l’ex Premier ministre ne se fait pas prier pour donner une autre couleur aux meetings du Frac.
« Faurevi be agban, agbodji » (« Faure, quitte le pouvoir ») est l’une de ses rengaines favorites qu’il lance ou reprend en chœur avec les sympathisants. Sans oublier son désormais célèbre « victago, victago » (du nom d’un célèbre baume local servant à diverses fins corporelles) !!
Dans le giron des partisans du Frac, Agbéyomé Kodjo est « un atout de poids dans la mesure où il connaît plus que quiconque les rouages du fonctionnement de la machine Rpt », analyse un professeur de droit à l’université de Lomé.
C’est également une « perte considérable pour le Rpt et une raison pour persévérer dans la contestation de la victoire de Faure Gnassingbé », ajoute-t-il.
Et, l’ancien protégé du défunt Eyadèma Gnassingbé a bien compris ce jeu. Par conséquent, il n’hésite pas à lancer des propos défiant son ancienne formation politique : « Je puis vous assurer que personne ne touchera à un seul de mes cheveux dans le cadre de notre lutte hebdomadaire » pour un Togo meilleur !
Une chose est sûre, l’ancien ministre de l’Intérieur ne compte pas redescendre de si tôt de la vague de popularité sur laquelle il surfe en ce moment.
« Cette subite popularité de M. Kodjo ne doit en aucun cas inquiéter l’Ufc, et très précisément Jean-Pierre Fabre, dans la mesure où l’Obuts ne représente pas grand chose sur l’échiquier politique togolais », avertit un éditorialiste local. Même si le principal concerné avoue ne pas se reconnaître dans les résultats définitifs proclamés par la Cour constitutionnelle au lendemain du scrutin du 4 mars 2010, résultats le créditant de « 0,85% » des voix. Un score qui le place en 4e position sur les 7 candidats en lice.
Pour une opposition togolaise au sein de laquelle les leaders réussissent rarement à faire le deuil de leurs ego surdimensionnés, cette montée en puissance de G. Kodjo va-t-elle laisser indifférents l’entourage de Jean-Pierre Fabre, et plus généralement l’ensemble des principaux responsables du Frac ? La réponse ne saurait tarder…
Source : Togo : de la popularité d’Agbéyomé Kodjo : www.AfriSCOOP.net